Prière végétale

par le père André Beauchamp

 

Béni sois-Tu, Seigneur, pour le règne végétal
Pour l’humilité des plantes et des herbes
Pour leur patience et leur ténacité.
Merci pour la fleur des champs, fragile et éphémère
Merci pour la rose, le lys, l’oeillet et même le pissenlit
Merci pour le saule et le bouleau
Pour l’érable, l’orme, le chêne
Pour le cèdre hésitant et le pin triomphant.
Merci pour l’exubérance végétale
Qui s’arrache à la terre et monte vers le ciel.

 

Patients témoins de la vie
Les arbres attendent le moment favorable
La bonne saison qui convient.
Ils fouissent le sol, s’agrippent à la pierre.
Ils s’entêtent doucement
Comme si le temps leur appartenait
Dans leur immobilité et leur fragilité.
Je puis demain les manger, les couper
M’en chauffer et m’en habiller.
Ce sont de bons compagnons
Généreux et dociles
J’ai beau les cultiver, je ne les possède jamais.
Y a-t-il une âme en chaque plante?
Y a-t-il un cæur dans l’arbre que j’aime?
Je ne le saurai jamais
Sauf en toi, Seigneur.

 

Ils vivent leur destin à leur manière
Calmes et silencieux sous la caresse du vent.
Ce sont nos ancêtres et nos aïeux
Dans le très long temps de la Terre.

 

Je suis une herbe des champs
Fragile et si proche de sa fin.
Je suis un arbre rugueux qui s’agrippe à la rive.
Je suis un frêne noir, un noyer, un hêtre
Je cherche le soleil et je tiens à la terre
Entre ciel et terre, je me cherche interminablement.
Béni sois-tu, Maître de l’arbre
Seigneur de la racine, de la sève, du lignite,
de l’écorce, de l’aubier.
Maître de la patience et des rythmes longs
Que chante la vie au rythme des saisons
Jusqu’en l’autre saison, la Tienne,
pour l’éternelle floraison.
Amen.

 

Source: Hymnes à la beauté du monde (Novalis, 2012)